Un esprit d’Asie.
Croissy sur Seine. 78.
Une lecture d’inspiration parmi d’autres durant le travail de création d’un jardin contemporain zen.
Le rêve dans le pavillon rouge de Cao Xueqin (? - 1763 ?), extrait.
« … Commençons notre promenade en suivant ce sentier » (…) Soudain, à flanc de rocher, au-dessus de lui, il remarqua un roc blanc dont on avait poli la surface et il comprit qu’il avait du être mis là pour qu’on y grave une inscription. (…)Ils débouchèrent dans un ravin artificiel qui flamboyait grâce aux fleurs et feuillages de nombreuses variétés d’arbustes et plantes qui y poussaient. Un peu plus bas, où la végétation était la plus touffue, un ruisseau surgissait d’entre les pierres. Après avoir avancé de quelques pas vers le nord, ce ravin s’ouvrit sur une petite vallée au fond plat et le cours d’eau s’élargit pour former un étang. Sur les pentes s’élevaient des pavillons aux décors joliment peints et sculptés dont la partie inférieure était cachée par des arbres et dont le sommet se détachait sur le bleu du ciel. Parmi ce paysage, en dessous d’eux, au milieu d’un pont qui enjambait l’eau, in petit pavillon avait été construit… (…)
Ils passèrent de l’autre coté (…) et marchèrent un moment en s’arrêtant pour admirer différents rochers, fleurs et arbres sur leur chemin. Puis ils se trouvèrent soudain au pied d’un mur blanc qui protégeait une petite retraite presque cachée par des centaines de bambous verts formant un bosquet dense. Ils pénétrèrent en criant des louanges. Une allée couverte suivait le mur depuis l’entrée jusqu’a l’autre extrémité de cette retraite et un sentier en cailloux menait à l’escalier d’une terrasse. Il y avait au fond une petite maison dont les fenêtres s’ouvraient sur trois de ses côtés. Les tables, sièges et divans qui la meublaient semblaient avoir été conçus spécialement pour cet intérieur. Dans le mur aveugle, une porte donnait derrière sur un jardin où un pêcher en fleurs dominait des plantains et que l’on pouvait aussi voir de deux loggias construites à l’arrière de la maison. (…)
« Ce doit être un endroit agréable à tout moment dit Jia Zheng en souriant. Imaginez-vous ici en train d’étudier près d’une fenêtre au clair de lune ! Voici un des plaisirs qui font que la vie mérite d’être vécue. » (…)
Leur promenade se poursuivit à travers des aspects encore inexplorés, (…) quelques rochers avaient été plantés ici et là dans la cour devant, où, d’un côté, poussaient quelques plantains et de l’autre, une variété de pommiers d’amour du Sichuan dont les fleurs doubles rouges pendaient comme à des fils d’or et dont la frondaison donnait l’impression d’ombrelles.
« Quelles fleurs magnifique s’exclamèrent les visiteurs. On ,’a jamais vu de pommiers d’amour aussi beaux que ceux-ci. » (…)
Il les conduisit par le côté d’un lit de repos à travers une porte dans un jardin plein de rosiers. Derrière un treillis couvert de roses, coulait de l’eau entre les rives verdoyantes. Les visiteurs demandèrent d’ou venait ce ruisseau. Le cousin Ehen pointa dans la direction de la retenue d’eau qu’ils avaient longée auparavant: « C’est l’eau qui déborde de cette retenue, passe à travers une grotte, sous l’herbe au nord-ouest de la montagne artificielle jusqu’à la petite ferme; ensuite une partie coule dans le coin sud-est du jardin et rejoint le cours principal ici, qui s’échappe par une ouverture au bas du mur. - Comme s’est ingénieux, dirent les autres à l’unissons. » Ils s’avancèrent jusqu’au pied d’un haut entassement de pierres. « Suivez-moi », dit le cousin Zhen, amusé par le désarroi, car ils ne savaient plus où ils étaient. Il leur fit contourner le pied de cette montagne artificielle et ils se retrouvèrent sur un large sentier plat. La porte majestueuse par laquelle ils étaient entrés se dressait imposante devant eux; « Oh ! s’exclamèrent les visiteurs, c’est encore plus surprenant que tout ce qu’on à vu. Le plan de ce jardin est d’une habileté proprement divine ! » Et ils sortirent du jardin.